
Tous ceux qui viennent le voir sont ses péripatéticiens. Obligatoirement on tourne autour. D’une des larges avenues en étoile, nous arrivons, déjà chargés du souvenir d’histoires sanglantes, en direction de ce donut géant. Le long du trottoir, des guides en armure plastique vendent des plans, des bouteilles d’eau, se font prendre en photo. Les entrées multiples assaillies de hordes rendent perplexe ; ce n’est jamais la bonne pour pénétrer dans le labyrinthe de ses galeries circulaires. Nous avons surmonté le contrôle des billets, des sacs, nous voilà prêts pour l’ascension : deux séries d’escaliers presque verticaux, usés par deux mille ans de spectateurs avides de spectaculaire. Que n’a-t-on imaginé pour rassasier leur soif insatiable de divertissement ? Plus loin, plus vite, plus haut, assurément. Plus sauvage, plus sordide, plus cruel n’en fut que la conséquence.
Nous débouchons sur l’esplanade. Devant nous, le squelette de l’arène, au-dessus, les estrades s’amenuisant jusqu’au ciel. Derrière, la loge impériale. Une fois propulsé au centre de l’entonnoir, qui ne serait prêt à être aspiré vers l’anéantissement, sous les coups d’un rétiaire ou le vertige d’une vestale ?
©proposition d’écriture « décrire un lieu sans le nommer »: Masterclass Eric-Emmanuel Schmitt – The Artist Academy